Newsletter n°100 – Avril 2017
Hygiène et sécurité : conséquences de l’absence de visites médicales obligatoires.
Avant le 1er janvier 2017, le salarié devait bénéficier d’un examen médical d’embauche ainsi que, tous les 24 mois, d’examens médicaux périodiques organisés par le médecin du travail. La Cour de cassation décide, de façon inédite, que l’absence de ces visites médicales obligatoires constitue un manquement ne faisant pas obstacle à la poursuite du contrat de travail. Dès lors, un tel motif ne peut justifier ni une résiliation du contrat de travail, ni une prise d’acte de la rupture du contrat de travail (Cass. Soc., 29 mars 2017, n°16-10.545 ; Cass. Soc. 30 mars 2017, 15-24.142).
Cotisations sociales: portée des lettres ministérielles et des circulaires de l’Acoss.
Une association reprochait à l’URSSAF d’avoir réintégré dans l’assiette des cotisations et contributions sociales la réduction Fillon, ainsi que les bons d’achat et cadeaux en nature attribués aux salariés à l’occasion des fêtes de Noël en 2010 et 2011. Les juges du fond lui ont donné raison, considérant que, en application d’une instruction ministérielle du 17 avril 1985, les cadeaux et bons d’achat attribués à un salarié pouvaient être exclus de l’assiette des cotisations, lorsqu’ils étaient attribués en relation avec un évènement. Par ailleurs, une lettre circulaire Acoss de 2011, reprenant une lettre ministérielle du 12 décembre 1988, édicte une présomption de non assujettissement des bons d’achat et cadeaux attribués à un salarié au cours d’une année civile, à condition que le montant alloué au cours de l’année n’excède pas 5% du plafond mensuel de la sécurité sociale, ce qui était le cas en l’espèce. La Haute Juridiction casse l’arrêt de la Cour d’appel de Colmar pour s’être fondée sur « une circulaire et une lettre ministérielle dépourvues de toute portée normative » (Cass. Soc., 30 mars 2017, n°15-25.453).
CHSCT : expert du CHSCT et secret professionnel.
Un directeur d’un centre hospitalier universitaire avait refusé, à l’expert mandaté par le CHSCT, l’accès aux blocs opératoires pendant les interventions, ainsi qu’aux réunions quotidiennes des équipes médicales en raison du secret médical. Le CHSCT et l’expert ont alors saisi les juges pour se voir autoriser cet accès. Les juges du fond, suivis par la Cour de cassation, ont considéré que cet expert n’était pas en relation avec l’établissement ni n’intervenait dans le système de santé pour les besoins de la prise en charge des patients, de sorte qu’il ne pouvait prétendre être dépositaire du secret médical. Par ailleurs, la Cour de cassation a relevé que la cour d’appel « a constaté d’une part que le motif du recours à l’expertise était l’accroissement de la charge de travail et l’inadaptation des locaux, d’autre part que l’expert disposait de moyens d’investigation tels que l’audition des agents, l’examen des plannings et la visite des lieux hors la présence des patients, de sorte que ces moyens suffisaient à l’accomplissement de sa mission » (Cass. Soc. 20 avril 2017, n°15-27.927 et 15-27.955).
Alerte professionnelle : procédures de recueil des signalements émis par les lanceurs d’alertes.
Pris en application de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, un décret prévoit qu’à compter du 1er janvier 2018, les entreprises de plus de 50 salariés seront tenues d’établir une procédure de recueil des signalements. Dans les groupes de sociétés, cette procédure pourra être commune à plusieurs d’entre elles. La désignation d’un référent, qui peut être extérieur à l’entreprise, sera également obligatoire. Enfin, les procédures mises en œuvre devront « faire l’objet d’une publicité adéquate, afin de permettre aux personnels et aux collaborateurs extérieurs et occasionnels d’en avoir une connaissance suffisante » (D. n°2017-564 du 19 avril 2017, JO du 20 avril).
Délégation unique du personnel: validation du délai de prévenance lié aux nouvelles modalités d’utilisation du crédit d’heures.
L’article R. 2326-3 du Code du travail, dans sa rédaction issue du décret du 23 mars 2016, soumet les membres de la DUP au respect d’un délai de prévenance de 8 jours pour recourir aux mécanismes de cumul et de répartition des heures de délégation. Un syndicat a demandé l’annulation, pour excès de pouvoir, de ce délai de prévenance. Le Conseil d’Etat a validé ce dispositif, considérant, d’une part, que la durée du délai de prévenance n’était pas excessive, et, d’autre part, que la différence de traitement par rapport à d’autres institutions représentatives du personnel n’était « pas manifestement disproportionnée au regard de l’équilibre à instaurer entre la facilité d’usage de cette possibilité et le bon fonctionnement de l’entreprise », de sorte qu’il n’y avait pas de rupture d’égalité (CE, 31 mars 2017, n°399957).
Défenseur syndical: validation des dispositions relatives au secret professionnel et à l’obligation de discrétion.
Le Conseil national des barreaux (CNB) a saisi le Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité concernant le statut du nouveau défenseur syndical, habilité à représenter les justiciables devant les cours d’appel en matière prud’homale. Selon le CNB, ces dispositions méconnaissent le principe d’égalité devant la justice, puisque le défenseur syndical, tenu à une obligation de secret professionnel limitée aux procédés de fabrication, ainsi qu’à une simple obligation de discrétion restreinte à certaines informations, ne présente pas des garanties de confidentialité aussi protectrices pour le justiciable que celles auxquelles sont tenus les avocats. Le Conseil Constitutionnel a écarté ce grief, considérant que « sont assurées aux parties, qu’elles soient représentées par un avocat ou un défenseur syndical, des garanties équivalentes quant au respect des droits de la défense et de l’équilibre des droits des parties » (CC, QPC, 7 avril 2017, n°2017-623, JO du 9 avril).
Inspection du travail : parution du décret portant code de déontologie du service public de l’inspection du travail.
Ce texte, pris en application de l’article L. 8124-1 du Code du travail, précise le cadre général des missions des agents de l’inspection du travail. Il détermine les règles qu’ils doivent respecter, ainsi que les prérogatives et garanties prévues pour l’exercice de leurs missions. En vertu de ce code, l’inspection du travail est notamment tenue, envers chaque usager, aux droits et devoirs suivants :
– Prévention des conflits d’intérêts ;
– Obligation de se consacrer à ses fonctions ;
– Devoirs de neutralité et d’impartialité ;
– Devoir d’information ;
– Obligations de discrétion, de secret et de confidentialité (D. n°2017-541 du 12 avril 2017, JO 14 avril).