Newsletter n°108 – Décembre 2017
Egalité de traitement : revirement de jurisprudence en matière de transfert conventionnel du contrat de travail.
Rompant avec la jurisprudence établie depuis 2014 (Cass. Soc. 15 janvier 2014, n°12-25.402), la Cour de cassation considère désormais que « la différence de traitement entre les salariés dont le contrat de travail a été transféré en application d’une garantie d’emploi instituée par voie conventionnelle […] et les salariés de l’employeur entrant, qui résulte de l’obligation à laquelle est tenu ce dernier de maintenir au bénéfice des salariés transférés les droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, n’est pas étrangère à toute considération de nature professionnelle et se trouve dès lors justifiée au regard du principe d’égalité de traitement ». Par conséquent, contrairement à la jurisprudence antérieure, des différences de traitement entre les salariés transférés et les salariés de l’entreprise d’accueil sont désormais justifiées (Cass. Soc. 30 novembre 2017, n°16-20.532).
Licenciement: conséquences d’une défaillance de la Poste.
Un salarié, convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement disciplinaire fixé le 18 février 2014, considérait que son employeur ne lui avait pas notifié son licenciement dans le délai d’un mois prévu par les dispositions de l’article L. 1332-2 du Code du travail. En effet, l’employeur lui avait notifié cette sanction le 4 mars 2014 par lettre recommandée avec avis de réception, mais le courrier lui avait retourné par la Poste avec la mention « défaut d’accès ou d’adressage ». Les juges du fond ont suivi l’argumentation du salarié et ont jugé le licenciement comme étant abusif, alors que l’adresse mentionnée sur le courrier était correcte. La Haute juridiction casse l’arrêt de la cour d’appel au motif « qu’il résultait de ses constatations que l’employeur avait notifié le licenciement à l’adresse exacte du domicile du salarié dans le délai d’un mois » (Cass. Soc., 30 novembre 2017, n°16-22.569).
Egalité de traitement : justification des différences entre les salariés entrés postérieurement à un accord et ceux qui ont été embauchés antérieurement à cet accord.
Des salariés, engagés après l’instauration d’une grille salariale par accord collectif, ont saisi la juridiction prud’homale d’une demande en paiement d’un rappel de salaire au motif qu’ils percevaient une rémunération moindre que leurs collègues engagés antérieurement à la conclusion de l’accord collectif. Pour les juges du fond, le fait que l’employeur ne puisse modifier unilatéralement la rémunération du salarié n’était pas à lui seul de nature à rendre légitime une disparité de traitement entre des salariés effectuant le même travail. La Haute Juridiction casse l’arrêt de la cour d’appel. Selon elle, « sauf disposition légale contraire, un accord collectif ne peut modifier le contrat de travail d’un salarié, seules les dispositions favorables de cet accord pouvant se substituer au contrat ; […] il en résulte que cette règle constitue un élément objectif pertinent propre à justifier la différence de traitement entre les salariés engagés antérieurement à l’entrée en vigueur d’un accord collectif et ceux engagés postérieurement, et découlant du maintien, pour les premiers, des stipulations de leur contrat de travail » (Cass. Soc., 7 décembre 2017, n°16-15.109).
Inaptitude: sanction du manquement de l’employeur à son obligation de reclassement.
L’article L. 1226-4 alinéa 3 du Code du travail, applicable à l’inaptitude non professionnelle, dispose qu’ « en cas de licenciement, le préavis n’est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l’indemnité mentionnée à l’article L. 1234-9. Par dérogation à l’article L. 1234-5, l’inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d’une indemnité compensatrice ». Selon la Cour de cassation, « l’indemnité de préavis est due au salarié inapte à son poste dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l’employeur à son obligation de reclassement » (Cass. Soc. 7 décembre 2017, n°16-22.276).
Rupture conventionnelle : précision sur le point de départ du délai de prescription.
L’article L. 1237-14 alinéa 3 du Code du travail dispose que « tout litige concernant la convention, l’homologation ou le refus d’homologation relève de la compétence du conseil de prud’hommes, à l’exclusion de tout autre recours contentieux ou administratif. Le recours juridictionnel doit être formé, à peine d’irrecevabilité, avant l’expiration d’un délai de douze mois à compter de la date d’homologation de la convention ». Pour la première fois, la Cour de cassation précise que ce délai de prescription court également en cas d’homologation implicite de la convention de rupture (Cass. Soc. 6 décembre 2017, n°16-10.220).
Licenciement : publication du décret relatif à la procédure de précision des motifs énoncés dans la lettre de licenciement.
Ce décret introduit dans le Code du travail les articles R. 1232-13 et R. 1233-2-2 qui disposent que « dans les quinze jours suivant la notification du licenciement, le salarié peut, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, demander à l’employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement.
L’employeur dispose d’un délai de quinze jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions s’il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé.
Dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes formes, l’employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement » (D. n°2017-1702 du 15 décembre 2017, JO du 17 décembre).
Procédure: précisions concernant les contestations d’avis du médecin du travail et la procédure de départage devant le bureau de conciliation et d’orientation.
Un décret précise qu’en cas de partage de voix lors du bureau de conciliation et d’orientation du conseil de prud’hommes, l’affaire sera renvoyée directement en bureau de jugement en formation départage. Quant à la contestation des avis du médecin du travail, il conviendra de saisir le conseil de prud’hommes en la forme des référés, dans un délai de 15 jours à compter de leur notification (D. n°2017-1698 du 15 décembre 2017, JO du 17 décembre).
Réforme du droit du travail : publication de la 6e ordonnance, dite « balai ».
Ce texte vise à « compléter et mettre en cohérence les dispositions prises en application de la loi n°2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social » (Ord. n°2017-1718 du 20 décembre 2017, JO du 21 décembre).