Newsletter n°73 – Janvier 2015
Conventions et accords collectifs: présomption de validité des avantages catégoriels.
La Cour de cassation vient d’apporter des précisions sur l’application du principe d’égalité de traitement dans les conventions et accord collectifs. En l’espèce, la convention collective nationale Syntec prévoyait divers avantages pour les ingénieurs et cadres, par exemple une durée de préavis plus longue ou des modalités de calcul de l’indemnité de licenciement plus favorables. La Cour de cassation juge que « les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions ou d’accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives […] sont présumées justifiées, de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération professionnelle ». Désormais, les avantages catégoriels sont donc présumés justifiés. C’est au salarié qui revendique le bénéfice d’un avantage réservé à une autre catégorie professionnelle qu’il appartient de démontrer le contraire (Cass. Soc., 27 janv. 2015, n°13-22.179).
Règlement intérieur: obligation de fixer la durée maximale de la mise à pied.
Une salariée avait fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire pour avoir été agressive envers son supérieur hiérarchique. Cette possibilité était prévue par le règlement intérieur, sans toutefois spécifier la durée maximale de cette sanction. La Cour de cassation juge qu’une mise à pied disciplinaire ne peut être licite que si le règlement intérieur, qui autorise l’employeur à recourir à ce type de sanction, a assorti celle-ci d’une durée maximale. Cette mention est obligatoire. A défaut, la mise à pied sera annulée, et ce même si la durée maximale était prévue par la convention collective applicable (Cass. Soc., 7 janv. 2015, n°13-15.630).
Clause de non-concurrence: délai de renonciation à la clause en cas de dispense d’exécution du préavis.
Un salarié a été licencié et dispensé de l’exécution de son préavis, qui lui a été rémunéré. Son contrat de travail prévoyait la possibilité de renoncer à la clause de non-concurrence, au plus tard dans un délai d’un mois suivant la notification de la rupture du contrat de travail. Ce n’est que pendant ce préavis non exécuté que la société a procédé à la levée de la clause. Le salarié estimait que la renonciation était tardive et réclamait le paiement de la contrepartie financière. La Cour d’appel avait donné raison à l’employeur, au motif qu’il s’était conformé aux dispositions contractuelles. La Cour de cassation ne suit pas cette argumentation et décide que « l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis, doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ». C’est donc la date de départ effectif de l’entreprise qui constitue le point de départ de l’obligation du salarié de respecter la clause. C’est aussi à cette date que la contrepartie financière devient exigible. (Cass. Soc., 21 janv. 2015, n°13-24.471).
Evaluation des salariés: validité d’un dispositif d’autoévaluation des salariés.
Le CHSCT d’une entreprise, ainsi que deux syndicats, contestaient la méthode d’évaluation mise en place par l’employeur. Au cours d’une première phase de ce dispositif, les salariés étaient invités à évaluer leurs propres performances en remplissant un formulaire établi par la société. Ce document servait ensuite de base au manager et au supérieur hiérarchique du manager pour l’évaluation du salarié. Le tout donnait ensuite lieu à un entretien, où chacun pouvait apporter des commentaires et modifications. La Cour d’appel de Versailles a considéré que ce dispositif d’auto-évaluation était licite, au motif « qu’aucune disposition régissant la matière ne proscrit l’implication du salarié dans son évaluation, par sa propre appréciation des résultats qu’il a atteint et des conditions dans lesquelles il est parvenu à ces résultats ». Ce dispositif n’a toutefois pas encore été validé par la Cour de cassation (CA Versailles, 19 déc. 2014, n°13‑03.952).
Visite de reprise: information préalable de l’employeur pour une visite de reprise à l’initiative du salarié.
Même si l’initiative de la visite de reprise appartient en principe à l’employeur, le salarié peut également en faire la demande, auprès du médecin du travail. Dans un tel cas, le salarié doit obligatoirement avertir l’employeur au préalable. A défaut, si l’employeur n’est averti de l’examen médical qu’au moment de sa réalisation, l’avis d’inaptitude qui peut éventuellement être délivré par le médecin du travail lui sera inopposable. Les examens pratiqués ne pourront pas être qualifiés de visite de reprise et l’employeur sera dispensé d’effectuer la procédure liée au constat d’inaptitude par le médecin du travail. (Cass. Soc., 7 janv. 2015, n°13-20.126 et 13-21.281).
Assurance chômage: obligation pour les salariés expatriés d’être affiliés à l’assurance chômage en France.
La Convention d’assurance chômage conclue le 14 mai 2014 prévoit que tous les employeurs établis en France ont l’obligation d’affilier au régime d’assurance chômage leurs salariés expatriés en dehors du territoire des Etats-membres de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ou de la Suisse, y compris ceux ayant la nationalité d’un Etat tiers. Une circulaire Unédic vient rappeler cette obligation aux employeurs. Auparavant, cette affiliation était facultative seulement pour les expatriés ressortissants d’un Etat tiers. Désormais, un salarié chinois expatrié en Inde par une entreprise française devra obligatoirement être affilié au régime d’assurance chômage français. Cette circulaire précise également les règles d’indemnisation applicables aux salariés travaillant hors de France ou employés par des organismes internationaux, ambassades et consulats (Circ. Unédic n°2014-34 du 23 décembre 2014).
Cumul emploi-retraite: pas de nouveaux droits à retraite.
En application de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, un décret du 30 décembre 2014 a précisé le principe des cotisations non génératrices de droits nouveaux à retraite. Ainsi, à compter du 1er janvier 2015, un assuré qui bénéficie d’une pension de retraite ne générera pas de droits nouveaux à retraite s’il reprend une activité, y compris si cette activité donne lieu à affiliation à un nouveau régime de retraite. Cette règle s’applique aux assurés et pensionnés de l’ensemble des régimes, pour les régimes de base et complémentaires. Mais elle n’est pas applicable aux pensions d’invalidité, d’inaptitude ainsi qu’aux régimes spéciaux de la Fonction publique, SNCF, RATP, Opéra de Paris et Comédie française. (D. n°2014-1713 du 30 décembre 2014, JO du 31 décembre).