Newsletter n°81 – Septembre 2015
Contrat de travail: précisions sur la rupture de la période d'essai.
Les dispositions de l’article L. 1221-25 du Code du travail impose à l’employeur qui rompt la période d’essai d’un salarié de respecter un délai de prévenance. Depuis une ordonnance du 26 juin 2014, ce texte précise que « lorsque le délai de prévenance n’a pas été respecté, son inexécution ouvre droit pour le salarié, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice ». La Cour de cassation considère que l’employeur, lorsqu’il met fin à la période d’essai avant son terme, peut dispenser le salarié de l’exécution de son « préavis », dès lors que ce dernier est réglé. Par conséquent, et contrairement à ce qu’avait jugé la cour d’appel, une telle rupture ne pouvait s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc., 16 septembre 2015, n°14-16.713).
Rupture conventionnelle: nouvelles précisions apportées par la Cour de cassation.
Dans une première affaire, un employeur avait convoqué une salariée, postérieurement à la démission de cette dernière, à un entretien préalable à une rupture conventionnelle auquel elle ne s’était finalement pas présentée. La salariée a ensuite saisi la juridiction prud’homale en demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail. Pour la Haute Juridiction, la proposition d’une rupture conventionnelle postérieurement à une démission ne remet pas en cause celle-ci. Dans une seconde affaire, la Cour de cassation précise que l’existence d’un vice du consentement relève de l’appréciation souveraine des juges du fond. En l’espèce, l’employeur avait exercé des pressions sur le salarié pour qu’il signe une rupture conventionnelle, de sorte que son consentement avait été vicié (Cass. Soc., 16 septembre 2015, n°14-10.291 et n°14-13.830).
Égalité salariale: périmètre d’appréciation de l’égalité de traitement.
Un salarié revendiquait le bénéfice d’un dispositif de retraite complémentaire applicable dans certaines filiales du groupe alors que la société qui l’employait ne faisait pas partie de celles qui avaient adhéré à ce régime. Le demandeur considérait ainsi qu’il y avait une rupture d’égalité entre les salariés du même groupe. La Haute juridiction rappelle ici que « le principe d’égalité de traitement n’est pas applicable entre salariés d’entreprises différentes, peu important qu’elles appartiennent au même groupe » (Cass. Soc., 16 septembre 2015, n°13-28.415).
Représentants du personnel: limites à la liberté d’expression pendant les réunions.
En matière de diffamation, il est de jurisprudence constante que le prévenu peut établir positivement sa bonne foi pour échapper à sa responsabilité pénale. En l’espèce, une salariée avait porté plainte pour diffamation non publique contre une déléguée syndicale qui l’avait accusée de harcèlement moral au cours d’une réunion de délégués du personnel à laquelle elle participait en tant qu’invitée. Si les juges du fond, suivis par la Cour de cassation, ont considéré que l’infraction de diffamation était bien caractérisée, ils ont relaxé la prévenue au bénéfice de sa bonne foi, retenant que « cette dernière poursuivait un but légitime en posant ainsi une question relative aux conditions de travail d’une salariée et aux incidences de celles-ci sur la santé de l’employée en sa qualité de déléguée syndicale » (Cass. Crim. 8 septembre 2015, n°14-81.495).
Temps de travail: indemnisation des temps de trajet des salariés « itinérants ».
La CJUE répond ici à la question préjudicielle suivante : le temps de déplacement domicile-clients des travailleurs qui n’ont pas de lieu de travail fixe ou habituel constitue-t-il du temps de travail au sens de l’article 2.1 de la directive 2003/88 ? Dans cette affaire, des techniciens chargés de l’installation et de la maintenance de systèmes de sécurité se déplaçaient chaque jour depuis leur domicile vers les lieux où se trouvaient leurs clients, selon une feuille de route établie par l’employeur. Cette distance pouvait parfois excéder 100 kilomètres. Pour l’employeur, le temps de déplacement devait être considéré comme du temps de repos et non comme du temps de travail et il ne prenait donc en compte que les temps des interventions sur sites et des déplacements intermédiaires pour se rendre d’un client à l’autre. Pour la CJUE, dans de telles circonstances, « dans lesquelles les travailleurs n’ont pas de lieu de travail fixe ou habituel, constitue du temps de travail, au sens de cette disposition, le temps de déplacement que ces travailleurs consacrent aux déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients désignés par leur employeur » (CJUE, 10 septembre 2015, affaire C-266/14).
Formation professionnelle: dématérialisation du dépôt du contrat de professionnalisation.
A compter du 1er septembre 2016, les entreprises devront déposer de manière dématérialisée leur contrat de professionnalisation auprès des OPCA par le biais du portail de l’alternance (D. n°2015-1093 du 28 août 2015, JO du 30 août).
Travail dominical: critères de délimitation des zones géographiques dans lesquelles il peut être dérogé au repos dominical.
La loi « Macron » du 6 août 2015 a élargi les possibilités pour les commerces de détail de déroger au repos dominical en créant notamment des zones commerciales, des zones touristiques et des zones touristiques internationales. Le décret d’application du 23 septembre 2015 fixe les critères permettant de délimiter ces zones. Les zones commerciales et touristiques seront délimitées par arrêtés préfectoraux, tandis que les zones touristiques internationales seront fixées par arrêtés des ministres du travail, du tourisme et du commerce (D. n°2015-1173 du 23 septembre 2015, JO du 24 septembre).
Participation: précisions sur le calcul de la réserve spéciale de participation.
Saisie d’une demande d’avis relative à la fixation du bénéfice net de l’employeur permettant de calculer le montant de la réserve spéciale de participation des salariés, la Cour de cassation précise que « pour l’application des dispositions de l’article L. 3324-1 du code du travail, l’impôt correspondant au bénéfice que l’entreprise a réalisé au cours d’un exercice déterminé, qui doit être retranché de ce bénéfice, ne peut s’entendre que de l’impôt sur les sociétés, au taux de droit commun, résultant des règles d’assiette et de liquidation qui régissent ordinairement l’imposition des bénéfices ; que, dans le cas où une entreprise bénéficie de crédits d’impôt imputables sur le montant de cet impôt, il n’y a pas lieu, par suite, de tenir compte du montant de ces crédits » (Cass. Avis du 14 septembre 2015, n°15006).