Newsletter n°91 – Juillet 2016
Licenciement: nullité du licenciement d’un lanceur d’alerte.
Un salarié avait été licencié après avoir dénoncé au procureur de la République les agissements d’un membre du conseil d’administration et du président de l’association au sein de laquelle il travaillait. Les faits étant antérieurs à la loi du 6 décembre 2013, qui interdit désormais un tel licenciement, les juges du fond ont considéré qu’il n’y avait pas lieu d’annuler le licenciement, dans la mesure où la nullité ne peut être prononcée en l’absence de texte la prévoyant. La Cour de cassation sanctionne cette position, au visa de l’article 10 al. 1 de la CEDH : « en raison de l’atteinte qu’il porte à la liberté d’expression, en particulier au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur lieu de travail, le licenciement d’un salarié prononcé pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions et qui, s’ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales, est frappé de nullité » (Cass. Soc., 30 juin 2016, n°15-20.557).
Licenciement: conséquences d’une irrégularité de procédure.
La Cour de cassation poursuit ici l’extension de sa nouvelle jurisprudence selon laquelle « l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond ». Un salarié qui entend obtenir des dommages-intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement doit ainsi justifier du préjudice qu’il prétend avoir subi (Cass. Soc., 30 juin 2016, n°15-16.066).
CDD: formalisme de la promesse d’embauche. <br />
En l’espèce, une cour d’appel avait condamné un employeur à verser à une salariée une indemnité de requalification du CDD en CDI, au motif que la lettre confirmant les conditions d’embauche ne comportait pas toutes les mentions obligatoires du CDD requises par les dispositions de l’article L. 1242-12 du Code du travail. Or, selon la Haute Juridiction, ces dernières « ne s’appliquent pas à une promesse d’embauche », le principe selon lequel la promesse d’embauche vaut contrat de travail n’étant applicable qu’au CDI (Cass. Soc. 6 juillet 2016, n°15-11.138).
CHSCT: prérogatives en matière de licenciement collectif pour motif économique.
Aux termes de l’article L. 1233-57-5 du Code du travail, « toute demande tendant, avant transmission de la demande de validation ou d’homologation, à ce qu’il soit enjoint à l’employeur de fournir les éléments d’information relatifs à la procédure en cours ou de se conformer à une règle de procédure prévue par les textes législatifs, les conventions collectives ou un accord collectif est adressée à l’autorité administrative. Celle-ci se prononce dans un délai de cinq jours ». L’article D. 1233-12 du même code ajoute qu’une telle demande d’injonction peut être adressée par le comité d’entreprise ou, à défaut, par les délégués du personnel. Le Conseil d’Etat précise ici que « lorsque sa consultation est requise, le CHSCT peut, au cours de la procédure d’information et de consultation préalable à la transmission d’une demande de validation ou d’homologation relative à un [PSE], saisir l’autorité administrative de toute atteinte à l’exercice de sa mission […] en formulant […] une demande d’injonction » (CE, 29 juin 2016, n°386.581).
Coemploi: confirmation de la définition restrictive de cette notion.
La Cour de cassation confirme ici sa jurisprudence Molex (Cass. Soc., 2 juillet 2014, n°13-15.208), selon laquelle « hors l’existence d’un lien de subordination, une société faisant partie d’un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur à l’égard du personnel employé par une autre que s’il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l’état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d’intérêts, d’activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière » (Cass. Soc., 6 juillet 2016, n°14-27.266).
Relations collectives : précisions relatives à la définition de la grève.
Un syndicat d’Air France avait appelé les salariés à ne plus signer les bons de travail tout en assurant « les réalisations des tâches uniquement liées au métier dans les règles de l’art ». Il a été condamné à payer à la société des sommes pour pertes d’heures productives et pour le recours à la sous-traitance. La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir considéré ce mouvement illicite, au motif que « la grève est la cessation collective et concertée de travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles ; qu’elle ne peut, dès lors, être limitée à une obligation particulière du contrat de travail » (Cass. Soc., 11 juillet 2016, n°14-14.226).
Procédure: l’appel en matière prud’homale reste gratuit.
Le ministère de la justice précise que les appels interjetés en matière prud’homale à compter du 1er août 2016 n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 1635 bis du Code général des impôts qui institue un droit d’un montant de 225 € (Circulaire du Garde des Sceaux du 5 juillet 2016).
IRP: modalités de consultation dans les entreprises de 50 salariés et plus.
Un décret précise les délais dans lesquels les différentes instances représentatives du personnel remettent leurs avis, ainsi que les modalités de fonctionnement du CHSCT. Il définit également le contenu des informations trimestrielles que l’employeur doit mettre à la disposition du comité d’entreprise (D. n°2016-868 du 29 juin 2016, JO du 30 juin 2016).
URSSAF: renforcement des droits des cotisants.
Un décret, dont certaines dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2017, renforce la motivation des décisions des organismes de recouvrement, notamment en ce qui concerne la décision de la commission de recours amiable et la mise en demeure. Les dispositions de la charte du cotisant contrôlé deviennent obligatoires et le délai de saisine de la commission de recours amiable est allongé de un à deux mois (D. n°2016-941 du 8 juillet 2016, JO du 10 juillet).
Procédure: aménagement du nouveau statut de défenseur syndical en matière prud’homale.
Les listes de défenseurs syndicaux sont établies et tenues à la disposition du public par le DIRECCTE, sur proposition des organisations d’employeurs et de salariés. Ils sont notamment désignés en fonction de leur expérience et de leurs connaissances en droit social. Les défenseurs syndicaux exercent leurs fonctions à titre gratuit. Ces listes sont révisées tous les quatre ans (D. n°2016-975 du 18 juillet 2016, JO du 20 juillet).