Newsletter n°93 – Septembre 2016
Comité d’entreprise: précisions relatives au caractère préfix du délai de consultation.<br /> <br />
Depuis la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, le comité d’entreprise dispose d’un délai préfix pour rendre son avis à l’issue d’une consultation. A l’expiration de ce délai, il est réputé avoir été régulièrement consulté et avoir rendu un avis négatif. Dans deux arrêts rendus le même jour, La Cour de cassation apporte des précisions importantes sur ce délai :
-Dans le premier arrêt, elle considère que le délai préfix s’impose également au juge du fond. En effet, ce dernier doit lui-même statuer avant l’expiration de ce délai ;
– Dans le second arrêt, elle précise que « si, en cas de difficultés particulières d’accès aux informations nécessaires à la formulation de l’avis motivé du comité d’entreprise, le juge peut décider la prolongation du délai prévu à l’article L. 2323-3 du code du travail, aucune disposition légale ne l’autorise à accorder un nouveau délai après l’expiration du délai initial». Elle rappelle néanmoins que l’employeur et le comité d’entreprise ont la possibilité de conclure un accord, à la majorité des membres titulaires élus, pour allonger ce délai ( Soc. 21 septembre 2016, n°15-13.363 et 15-19.003).
Salaire: précision inédite relative aux différences de traitement entre salariés relevant d’établissements différents.
Reprenant un attendu de principe constant, la Cour de cassation rappelle qu’« une différence de traitement établie par un engagement unilatéral ne peut être pratiquée entre des salariés relevant d’établissements différents et exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives, dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence ». Pour la première fois, La Haute juridiction précise, dans un arrêt important, que la disparité du coût de la vie constitue une justification objective pertinente pour pratiquer une différence de traitement entre les salariés de deux établissements distincts (Cass. Soc. 14 septembre 2016, n°15-11.386).
Rupture du contrat de travail : sommes dues au salarié en cas de prise d’acte justifiée de la rupture de son contrat de travail.
Une cour d’appel avait réduit le montant de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, au motif que la salariée avait aussitôt retrouvé du travail après la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail. La Haute juridiction casse cet arrêt. En effet, « le juge qui retient que la prise d’acte avait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse doit accorder au salarié qui le demande, l’indemnité de préavis et les congés payés afférents, l’indemnité de licenciement et les dommages-intérêts auxquels il aurait eu droit en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse » (Cass. Soc. 14 septembre 2016, n°14-16.663).
Licenciement: obligation de réintégration, à la demande du salarié, en cas de nullité du licenciement.
Une salariée, en charge du ménage et de l’entretien des locaux d’une clinique réclamait, dans le cadre de la requalification du CDD en CDI à temps plein, sa réintégration dans l’entreprise. Bien que reconnaissant la nullité du licenciement, les juges du fond l’ont déboutée de sa demande de réintégration, au motif que la clinique avait totalement confié à une société tierce le nettoyage de ses locaux, de sorte que le poste occupé par la salariée n’existait plus au sein de la société, ce qui rendait sa réintégration, demandée au bout de trois ans, impossible. Pour la Cour de cassation, « le seul fait de confier à un prestataire de service le nettoyage des locaux ne caractérise pas une impossibilité matérielle pour l’employeur de réintégrer la salariée dans son emploi ou, à défaut, dans un emploi équivalent, peu important le fait que la salariée ait attendu trois ans pour solliciter sa réintégration » (Cass. Soc. 14 septembre 2016, n°15-15.944).
Temps de travail : qualification du temps passé dans un logement de fonction hors intervention.
Aux termes de l’article L. 3121-1 du Code du travail, « la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ». Dans cette affaire, un médecin salarié, qui était contraint de rester dans un logement imposé par l’employeur afin de pouvoir intervenir en cas d’urgence, réclamait des heures supplémentaires pour le temps passé à la disposition de son employeur. Pour la Cour de cassation, cette sujétion « ne l’empêchait pas de vaquer à des occupations personnelles », de sorte que « la période litigieuse ne constituait pas du temps de travail effectif » (Cass. Soc. 8 septembre 2016, n°14-23.714).
Temps de travail : conditions de validité du dispositif de contrôle dans le cadre du forfait-jours.
La Haute juridiction valide l’accord collectif prévoyant le recours au forfait jours selon les modalités suivantes :
-Les dispositions assurent la garantie du respect des repos journaliers et hebdomadaires ;
– Le suivi et le contrôle de la charge de travail sont organisés selon une périodicité mensuelle par le biais d’un relevé déclaratif signé par le supérieur hiérarchique et validé par le service des ressources humaines ;
-Il existe un dispositif d’alerte de la hiérarchie en cas de difficulté, avec possibilité de demander un entretien auprès des ressources humaines.
Selon la Cour de cassation, un tel accord répond aux exigences relatives au droit à la santé et au repos (Cass. Soc. 8 septembre 2016, n°14-26.256).
Temps de travail: méconnaissance d’une convention de forfait-jours et travail dissimulé.
Depuis plusieurs années, la Cour de cassation considère que l’infraction de travail dissimulé n’a pas un caractère automatique. Elle exige, en effet, pour caractériser cette infraction, qu’il soit établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué (Cass. Soc. 23 janvier 2013, n°11-23.428). Elle précise ici, concernant plus particulièrement le recours au forfait jours, que « le caractère intentionnel de la dissimulation des heures supplémentaires résultant de la privation d’effet de la convention individuelle de forfait ne découle pas de la seule constatation de l’inexécution par l’employeur de ses obligations conventionnelles de contrôle de l’amplitude et de la charge de travail » (Cass. Soc. 14 septembre 2016, n°14-26.099).