Newsletter n°94 – Octobre 2016
Restructuration: application des garanties collectives de l’entreprise absorbante aux salariés de l’entreprise absorbée.
A la suite d’une fusion absorption, l’entreprise absorbante avait proposé aux salariés de l’entreprise absorbée une option consistant soit à conserver les avantages individuels acquis chez leur précédent employeur, soit à signer un nouveau contrat de travail pour leur permettre de bénéficier d’une prime mise en place par accord collectif, en contrepartie de la renonciation à leurs avantages individuels acquis. Relevant le moyen d’office, la Cour de cassation décide que « l’employeur entrant ne peut subordonner le bénéfice dans l’entreprise d’accueil des avantages collectifs, qu’ils soient instaurés par voie d’accords collectifs, d’usages ou d’un engagement unilatéral de l’employeur, à la condition que les salariés transférés renoncent aux droits qu’ils tiennent d’un usage ou d’un engagement unilatéral en vigueur dans leur entreprise d’origine au jour du transfert ou qu’ils renoncent au maintien des avantages individuels acquis en cas de mise en cause d’un accord collectif » (Cass. Soc. 13 oct. 2016, n°14-25.411).
Rupture du contrat de travail : précision sur les sommes dues au salarié en cas de prise d’acte.
L’article L. 1235-2 du Code du travail dispose que « si le licenciement survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ». Statuant sur un moyen relevé d’office, la Cour de cassation précise que cette indemnité ne peut être allouée que lorsque le contrat de travail a été rompu par un licenciement. Par conséquent, il n’y a pas lieu d’en faire bénéficier le salarié à la suite d’une prise d’acte de la rupture de son contrat de travail requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 19 oct. 2016, n°14-25.067).
Harcèlement : irresponsabilité de l’employeur en cas d’actes commis par des tiers.
Un couple de gardiens d’immeuble, victime de faits de harcèlement commis par les résidents, reprochait aux juges du fond de ne pas avoir condamné son employeur à lui verser des dommages et intérêts pour violation de son obligation de sécurité. La Haute juridiction approuve la cour d’appel d’avoir jugé ainsi, dès lors qu’elle avait constaté que « les faits établis par le salarié [avaient] été commis par des tiers qui n’exerçaient pas de fait ou de droit, pour le compte de l’employeur, une autorité sur l’intéressé », « le salarié ayant seulement soutenu que le manquement à l’obligation de sécurité résultait d’agissements de harcèlement moral » (Cass. Soc. 19 oct. 2016, n°14-29.623 et 14-29.624).
Vestiaires et restauration : modification du régime de la mise à disposition de ces locaux.
A compter du 1er janvier 2017, l’employeur ne sera plus obligé de mettre systématiquement à la disposition de ses salariés un local dédié au vestiaire. En effet, il pourra mettre à la disposition des travailleurs qui ne sont pas obligés de porter des vêtements de travail spécifiques ou des équipements de protection individuelle, un meuble de rangement sécurisé à proximité de leur poste de travail. En outre, les entreprises dans lesquelles « l’emplacement » dédié aux repas peut être aménagé dans les locaux affectés au travail n’auront plus à demander l’autorisation à l’inspecteur du travail. Une simple déclaration adressée conjointement à ce dernier et au médecin du travail suffira (D. n°2016-1331 du 6 oct. 2016, JO du 8 oct.).
Licenciement: conformité de l’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Aux termes de l’article L. 1235-3 du Code du travail, « si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ». Un employeur a contesté la constitutionnalité de cette disposition, en considérant que cette indemnité minimale de 6 mois de salaire créerait une rupture d’égalité devant la loi puisqu’elle n’est prévue que pour les entreprises d’au moins 11 salariés. Le Conseil Constitutionnel considère que ce n’est pas le cas, dans la mesure où le législateur a ainsi « entendu éviter de faire peser une charge trop lourde sur les entreprises qu’il a estimées économiquement plus fragiles, en aménageant les conditions dans lesquelles la responsabilité de l’employeur peut être engagée. Il a ainsi poursuivi un but d’intérêt général ». Par conséquent, le législateur pouvait limiter le champ d’application de cette indemnité, en retenant le critère des effectifs de l’entreprise, dès lors que le droit à réparation des salariés n’est pas restreint. Le Conseil Constitutionnel ajoute, enfin, que « le critère retenu est donc en adéquation avec l’objet de la loi, qui consiste à dissuader les employeurs de procéder à des licenciements sans cause réelle et sérieuse » (CC, 13 oct. 2016, n°2016-582 QPC, JO du 15 oct.).
Affichage obligatoire et relations avec l’administration : simplification des obligations des entreprises.
Désormais, les obligations en matière d’affichage sont remplacées par des obligations de « communication par tout moyen » aux salariés concernés. De la même manière, un certain nombre d’obligations de transmission à l’inspection du travail sont remplacées par des obligations de tenir à sa disposition certains documents (D. n°2016-1417 et 2016-1418 du 20 oct.2016, JO du 22 oct.).
Cotisations sociales: précisions relatives à l’extension du rescrit social.
Il est désormais possible, pour les organisations patronales et syndicales représentatives au niveau des branches, de soumettre un rescrit au nom de leurs adhérents auprès de l’Acoss. En outre, les employeurs peuvent également soumettre un rescrit à l’Agefiph afin de vérifier qu’ils remplissent leurs obligations en matière d’emploi de travailleurs handicapés. Le décret du 25 octobre précise les modalités de recours à ces deux mécanismes (D. n°2016-1435 du 25 oct. 2016, JO du 27 oct.).
Comité d’entreprise : simplification de l’appréciation du seuil de 300 salariés.
En matière d’information-consultation et de fonctionnement du comité d’entreprise, le seuil de 300 salariés s’apprécie dorénavant dans les mêmes conditions que le franchissement du seuil de 50 salariés pour la mise en place du comité d’entreprise : ce seuil doit être atteint pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes (D. n°2016-1435 du 25 oct. 2016, JO du 27 oct.).