NewsletterNewsletter n°142 – Octobre 2020
LICENCIEMENT POUR MOTIF PERSONNEL: Limites à la protection du père contre le licenciement après une naissance.
Dans cette affaire, un salarié avait pris trois jours de congé du 23 au 25 novembre 2015 à la suite de la naissance de son enfant, le 20 novembre 2015. Il a bénéficié de la période de protection contre le licenciement de quatre semaines, prévue à l’article L.1225-4-1 du code du travail, avant d’être licencié pour insuffisance professionnelle à l’issue de celle-ci. On rappellera ici que, depuis la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les hommes et les femmes, le père bénéficie également d’une protection contre le licenciement pendant les quatre semaines suivant la naissance de son enfant, l’employeur ne pouvant le licencier que s’il justifie d’une faute grave de l’intéressé, ou de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant. Le salarié a contesté la validité de son licenciement, car les actes préparatoires (la convocation à l’entretien préalable et l’entretien lui-même) avaient eu lieu pendant la période de protection. Le salarié se prévalait, en effet, de la jurisprudence européenne reprise par la Cour de cassation, suivant laquelle les actes préparatoires au licenciement sont prohibés pendant la période de protection dont bénéficient les salariées durant le congé de maternité. La Cour d’appel avait fait droit à la demande du salarié et avait prononcé la nullité du licenciement. La Cour de Cassation en a décidé autrement, considérant que l’interdiction des mesures préparatoires au licenciement n’étaient applicables qu’aux salariées enceintes, accouchées ou allaitantes durant leur congé de maternité et ne s’étendait pas au père, pendant la période de protection prévue à l’article L.1225-4-1 du code du travail (Cass. Soc. 30 sept. 2020, n°19-12.036).
LICENCIEMENT POUR INAPTITUDE: Défaut de consultation du CSE en cas de licenciement pour inaptitude d’origine non-professionnelle.
Depuis le 1er janvier 2017, le comité social et économique (CSE) doit obligatoirement être consulté dans le cadre du reclassement d’un salarié déclaré inapte, que cette inaptitude soit d’origine professionnelle ou non professionnelle (auparavant, cette consultation obligatoire était réservée à l’inaptitude d’origine professionnelle). Dans un arrêt du 30 septembre 2020, la Cour de cassation nous éclaire sur les conséquences de l’absence de consultation du CSE sur le reclassement d’un salarié dont l’inaptitude est d’origine non-professionnelle. En effet, dans cette affaire, un salarié a été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, à l’issue d’un examen du 10 mars 2017. L’employeur a licencié le salarié pour inaptitude et impossibilité de reclassement sans avoir préalablement recueilli l’avis des délégués du personnel. Le salarié en a déduit que l’obligation de reclassement n’était pas satisfaite et que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse. La Cour d’appel de Bourges le déboute de sa demande, considérant que le non-respect de l’obligation de consulter les représentants du personnel sur le reclassement n’a pas pour effet de rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse, contrairement au licenciement pour inaptitude professionnelle pour lequel cela est expressément prévu par l’article L. 1226-15 du code du travail. La Cour de cassation en décide autrement et casse l’arrêt de la Cour d’appel, considérant qu’il « résulte de ces textes (articles L.1226-2 et L.1226-2-1, alinéas 2 et 3 du code du travail) que la méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte consécutivement à un accident non professionnel ou une maladie, dont celle imposant à l’employeur de consulter les délégués du personnel, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse » (Cass. Soc. 30 sept. 2020, n°19-11.974).
RUPTURE CONVENTIONNELLE: Incidence de la non-remise d’un exemplaire de la convention au salarié.
La récente ligne jurisprudentielle rigoureuse relative à la remise d’un exemplaire de la convention de rupture à chacune des parties se confirme. Dans deux arrêts du 3 juillet 2019 (cf. notre numéro « 127 » du mois de juillet 2019), la Cour de cassation avait indiqué que « seule la remise au salarié d’un exemplaire de la convention signé des deux parties lui permet de demander l’homologation de la convention et d’exercer son droit de rétractation en toute connaissance de cause ». Dans une nouvelle affaire, un salarié a conclu une rupture conventionnelle avec son employeur, qui a été homologuée par la Dirrecte et pris effet le 5 septembre 2015. Le salarié a ensuite saisi la juridiction prud’homale en invoquant la nullité de la rupture en raison de la non-remise d’un exemplaire de la convention. La Cour d’appel a fait droit à la demande du salarié en annulant la convention de rupture et en indiquant que cette annulation produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La Cour de cassation valide l’arrêt de la Cour d’appel en ces termes : « la cour d’appel, qui a constaté qu’aucune mention de la remise d’un exemplaire de la convention n’avait été portée sur le formulaire, et qui a retenu que l’employeur n’apportait aucun élément de preuve tendant à démontrer l’existence de cette remise, en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante, que la convention de rupture était nulle » (Cass. Soc. 23 sept. 2020, n°18-25.770).
CLAUSE DE NON-CONCURRENCE: Formalisme de la renonciation à la clause de non-concurrence.
Dans cette affaire, l’employeur avait renoncé à la clause de non-concurrence par courriel, alors que le contrat de travail prévoyait une faculté de renonciation par lettre recommandée avec accusé de réception. Le salarié a saisi la juridiction prud’homale pour demander la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et a été débouté par la Cour d’appel. La Cour de Cassation ne la suit pas, considérant qu’il ne pouvait être suppléé à la formalité de la lettre recommandée par la preuve que le salarié avait connaissance qu’il était libéré du respect de cette clause par le courriel de l’employeur lui indiquant qu’il levait la clause (Cass. Soc. 21 oct. 2020, n° 19-18.399).
OBLIGATION DE LOYAUTE: Création d’une entreprise concurrente.
Un salarié avait créé une entreprise concurrente à celle de son employeur après avoir donné sa démission et pendant son préavis. L’employeur lui avait notifié une rupture de son préavis pour faute lourde estimant qu’il s’agissait d’un acte de concurrence déloyale. Cependant, la Cour de cassation a considéré que, dans la mesure où seule l’immatriculation de la société concurrente avait été constituée pendant le préavis alors que son exploitation n’avait débuté qu’après sa rupture, le salarié n’avait pas manqué à son obligation de loyauté (Cass. Soc. 23 sept. 2020, n° 19-15.313).
COVID-19: Nouvelles mesures générales dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire.
A compter du 30 octobre 2020, les déplacements en dehors du domicile sont interdits à l’exception, notamment, des déplacements à destination ou en provenance du lieu d’exercice d’une activité professionnelle. Seuls certains établissements recevant du public, listés dans ce décret, sont autorisés à rester ouverts. Comme lors du premier confinement du mois de mars 2020, les employeurs sont appelés à privilégier, dès que cela est possible, le télétravail (D. n°2020-1310 du 29 oct. 2020, JO du 30 oct.).