NewsletterNewsletter n°155 – Novembre 2021
VIDEOSURVEILLANCE: Précisions sur les formalités obligatoires préalables.
La salariée d’une pharmacie a été licenciée pour faute grave après avoir saisi informatiquement une quantité de produits inférieure à ceux réellement vendus ou vendu des produits à un prix inférieur au prix ou sans les enregistrer. Pour prouver ces faits, l’employeur s’appuyait notamment sur des enregistrements de vidéosurveillance. La Cour d’appel a considéré que le licenciement reposait sur une faute grave et que le système de vidéosurveillance était licite, car les salariés avaient été informés de son existence. La Haute juridiction casse cependant cet arrêt, au motif que le comité d’entreprise n’avait pas été consulté sur l’utilisation du dispositif de vidéosurveillance dans le but de contrôler et surveiller l’activité des salariés, de sorte que ce moyen de preuve tiré des enregistrements de la salariée était illicite (Cass. Soc., 10 nov. 2021, 20-12.263).
REMUNERATION VARIABLE: Incidence de l’absence de fixation des objectifs.
Un salarié, dont le contrat avait été rompu, contestait son licenciement et réclamait notamment le versement de sa rémunération variable annuelle, laquelle était payée en fonction de l’atteinte des objectifs de vente. Selon la Cour de cassation, « la cour d’appel, qui a constaté que l’employeur avait manqué à son obligation contractuelle d’engager chaque année une concertation avec le salarié en vue de fixer les objectifs dont dépendait la partie variable de la rémunération, a, sans méconnaître son office, décidé à bon droit que la rémunération variable contractuellement prévue devait être versée intégralement pour chaque exercice » (Cass. Soc., 4 nov. 2021, n°19-21.005).
RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL: Précision sur la sanction en cas de licenciement injustifié pendant un arrêt maladie.
En principe, lorsqu’un salarié est licencié pendant un arrêt pour maladie d’origine non professionnelle et qu’il n’est pas en mesure d’effectuer son préavis, ce dernier ne lui est pas payé. En l’espèce, le licenciement avait été prononcé pour absence prolongée désorganisant l’entreprise et rendant nécessaire le remplacement définitif de l’intéressé. La cour d’appel, après avoir constaté que l’existence d’une désorganisation d’un service essentiel de l’entreprise n’était pas établie par l’employeur, en a déduit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse. La Cour de cassation l’approuve d’avoir jugé que « le salarié avait droit au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis nonobstant son arrêt de travail pour maladie au cours de cette période » (Cass. Soc. 17 nov. 2021, n°20-14-848).
INAPTITUDE: Conséquences du maintien prolongé en inactivité du salarié inapte.
L’article L.1226-4 alinéa 1er du Code du travail dispose que « lorsque, à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n’est pas reclassé dans l’entreprise ou s’il n’est pas licencié, l’employeur lui verse, dès l’expiration de ce délai, le salaire correspondant à l’emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ». La loi n’impose cependant aucun délai pour licencier ou reclasser le salarié déclaré inapte. En l’espèce, la Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir jugé que le maintien délibéré du salarié « dans une situation d’activité forcée au sein de l’entreprise sans aucune évolution possible » « constituait un manquement suffisamment grave justifiant que la résiliation judiciare du contrat de travail fût prononcée aux torts de l’employeur » (Cass. Soc., 4 nov. 2021, n°19-18.908).
RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL: Précision sur les circonstances entourant la rupture conventionnelle.
En matière de rupture conventionnelle, la Cour de cassation considère depuis quelques années « qu’en l’absence de vice du consentement, l’existence de faits de harcèlement moral n’affecte pas en elle-même la validité de la convention de rupture » (Cass. Soc., 23 janvier 2019, n°17-21.550). Pour la première fois, la Cour de cassation se prononce sur la validité d’une rupture conventionnelle en cas d’existence de faits de harcèlement sexuel et approuve la cour d’appel d’avoir prononcé la nullité de la convention de rupture : « ayant relevé qu’à la date de la signature de la convention de rupture conventionnelle, l’employeur, informé par la salariée de faits précis et réitérés de harcèlement sexuel de la part de son supérieur hiérarchique, n’avait mis en oeuvre aucune mesure de nature à prévenir de nouveaux actes et à protéger la salariée des révélations qu’elle avait faites en sorte que celle-ci, qui se trouvait dans une situation devenue insupportable et dont les effets pouvaient encore s’aggraver si elle se poursuivait, n’avait eu d’autre choix que d’accepter la rupture et n’avait pu donner un consentement libre et éclairé, la cour d’appel, qui a fait ressortir l’existence d’une violence morale, a légalement justifié sa décision » (Cass. Soc., 4 nov. 2021, n°20-16.550).
ELECTIONS PROFESSIONNELLES: Inconstitutionnalité de l’exclusion de l’électorat de certains salariés.
Aux termes de l’article L.2314-18 du Code du travail, « sont électeurs les salariés des deux sexes, âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relatives à leurs droits civiques ». Selon le syndicat à l’initiative de la QPC, ces dispositions méconnaitraient « le principe de participation des travailleurs dès lors que, telles qu’interprétées par la Cour de cassation, elles privent les salariés susceptibles d’être assimilés à l’employeur de la qualité d’électeur aux élections professionnelles, et donc de toute représentation au comité social et économique ». Le Conseil Constitutionnel, considérant qu’ « en privant des salariés de toute possibilité de participer en qualité d’électeur à l’élection du comité social et économique, au seul motif qu’ils disposent d’une telle délégation ou d’un tel pouvoir de représentation, ces dispositions portent une atteinte manifestement disproportionnée au principe de participation des travailleurs », les a déclarées contraires à la Constitution. L’abrogation de l’article L. 2314-18 du Code du travail est toutefois reportée au 31 octobre 2022 (CC, 19 nov. 2021, n°2021-947 QPC).
COVID-19: Prolongation du dispositif des arrêts de travail dérogatoires.
Un décret du 8 janvier 2021 a institué la possibilité, pour les salariés mis à l’isolement parce qu’ils sont cas contact ou parce qu’ils présentent une vulnérabilité importante, sans possibilité de télétravail ou d’activité partielle, de bénéficier d’un arrêt de travail indemnisé dans les conditions de droit commun. Ce dispositif, qui devait s’appliquer jusqu’au 30 septembre 2021, a été prolongé jusqu’au 31 décembre 2021 (D. n°2021-1412 du 29 oct. 2021, JO du 30 oct.).
PRESENCE PARENTALE: Assouplissement des conditions de renouvellement du congé.
Désormais, lorsque le nombre maximal de 310 jours de congé est atteint pendant une période de 3 ans, les parents d’enfants atteints d’un cancer ou souffrant d’autres pathologies nécessitant des soins lourds pourront notamment le prolonger pour la même durée sans attendre l’expiration de la période de 3 ans (L. n°2021-1484 du 15 nov. 2021, JO du 16 nov.).