NewsletterNewsletter n°165 – Septembre 2022
COVID-19: La consultation ponctuelle sur un projet de réorganisation n’est pas subordonnée au respect préalable par l’employeur de l’obligation de consulter le CSE sur les orientations stratégiques de l’entreprise.
Pour mémoire, le CSE est consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise (C. trav., art. L.2312-8 et L.2312-37), mais également à propos des orientations stratégiques de l’entreprise (C. trav., art. L.2312-24). Dans cette affaire, un organisme de gestion d’un établissement scolaire avait informé le CSE du projet de procéder à la fermeture d’un lycée. Cette consultation ponctuelle a eu lieu avant les réunions de consultation du même CSE sur les orientations stratégiques. Le CSE a saisi le tribunal judiciaire sur l’articulation entre ces deux consultations, afin de faire juger l’irrégularité de leur organisation. La cour d’appel a considéré que la fermeture de cet établissement constituait une orientation stratégique qui devait elle-même être préalablement soumise à l’information et la consultation du CSE. Par conséquent, la consultation ponctuelle engagée par l’employeur devait être suspendue jusqu’à la clôture de la consultation annuelle du CSE portant sur les orientations stratégiques. Dans cet arrêt, la Cour de cassation tranche la question posée en doctrine de l’articulation de la consultation récurrente sur les orientations stratégiques de l’entreprise avec les consultations ponctuelles. Elle retient que « la consultation ponctuelle sur la modification de l’organisation économique ou juridique de l’entreprise ou en cas de restructuration et compression des effectifs n’est pas subordonnée au respect préalable par l’employeur de l’obligation de consulter le comité social et économique sur les orientations stratégiques de l’entreprise » (Cass. Soc., 21 septembre 2022, n° 20-23.660).
CSE CENTRAL: L’ordre du jour peut être modifié en début de réunion à l’unanimité des membres présents.
En l’espèce, un comité central d’entreprise (CCE) a voté une délibération donnant mandat à son secrétaire pour agir en justice pour délit d’entrave, alors même que le vote d’une telle délibération ne figurait pas dans l’ordre du jour transmis huit jours en amont, et n’était pas davantage en lien avec les questions devant être débattues au cours de la réunion. La chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé qu’une délibération autorisant le CCE à agir en justice pour délit d’entrave est régulière, même si ce point ne figurait pas initialement à l’ordre du jour, dès lors qu’il y a été ajouté en début de réunion à l’unanimité des membres présents. Dans ce cas précis, l’action est recevable, peu important le non-respect du délai de communication de l’ordre du jour de huit jours prévu à l’article L. 2327-14 du Code du travail, dans sa rédaction alors applicable. (Cass. Crim., 13 sept. 2022, n°21-83.914). Pour justifier sa décision, la Cour de cassation indique que le délai minimal de 8 jours de communication de l’ordre du jour du CCE est édicté dans l’intérêt de ses membres. Par conséquent, ce délai peut être écarté si la modification de l’ordre du jour a été adoptée à l’unanimité des membres présents. Cette solution est transposable au CSE central puisque le nouvel article L. 2316-17 du Code du travail reprend à l’identique les termes de l’article L. 2327-14 ancien issu du même Code. Cette solution semble tout autant transposable au CSE d’établissement, puisque le raisonnement suivi par la Cour est également applicable à cette instance. Une confirmation demeure toutefois attendue sur ce dernier point.
EGALITE DE TRAITEMENT: La détention d’un diplôme ne permet pas toujours de légitimer une inégalité de traitement entre salariés occupant un même poste.
En l’espèce, une salariée engagée par la Poste a été licenciée. Dans le cadre d’un contentieux relatif à la rupture de son contrat de travail, elle a contesté sa classification. La demanderesse a en effet invoqué une atteinte au principe d’égalité de traitement résultant de ce qu’elle était classée I-2 tandis que sa collègue au même poste bénéficiait de la classification I-3, supérieure. L’employeur soutenait que cette différenciation se trouve justifiée dans la mesure où cette collègue était l’unique salariée qui, à ce poste, détenait un diplôme. Dans sa décision du 14 septembre 2022, la Cour de cassation rappelle, sur le fondement du principe d’égalité de traitement, que « la seule différence de diplômes ne permet pas de fonder une différence de traitement entre des salariés qui exercent les mêmes fonctions ». Néanmoins, elle rappelle également qu’une telle différenciation de traitement peut être légitimée « s’il est démontré par des justifications, dont il appartient au juge de contrôler la réalité et la pertinence, que la possession d’un diplôme spécifique atteste de connaissances particulières utiles à l’exercice de la fonction occupée ».
Au cas particulier, la Cour de cassation condamne la société, aux motifs que l’employeur « ne justifiait pas du diplôme de la salariée à laquelle elle se comparait » et que la cour d’appel « ne constatait pas que ce diplôme attestait de connaissances particulières utiles à l’exercice de la fonction occupée ». (Cass. Soc., 14 sept. 2022, n°21-12.175).
ACTION SYNDICALE: Un syndicat peut réclamer la suspension du règlement intérieur pour défaut de consultation du comité social et économique.
Pour mémoire, l’introduction, la modification et le retrait de clauses du règlement intérieur doivent répondre à certaines formalités, dont l’obligation préalable de le soumettre à l’avis du comité social et économique (CSE) (C. trav., art. L. 1321-4). En l’espèce, un syndicat avait assigné une entreprise ayant modifié son règlement intérieur, pour demander l’annulation de celui-ci. Le syndicat invoquait l’absence de consultation des CHSCT et des comités d’établissement dans le cadre de la procédure de modification du règlement intérieur. Dans un arrêt du 21 septembre 2022, la Cour de cassation indique, de manière inédite, qu’« un syndicat est recevable à demander en référé que soit suspendu le règlement intérieur d’une entreprise en raison du défaut d’accomplissement par l’employeur des formalités substantielles tenant à la consultation des institutions représentatives du personnel, en l’absence desquelles le règlement intérieur ne peut être introduit ». La Cour de cassation justifie sa solution par le fait que le non-respect de ces formalités porte un préjudice à l’intérêt collectif de la profession, représentée par le syndicat. Toutefois, dans ce même arrêt, la Cour de cassation pose une importante limite au droit d’agir du syndicat. Elle considère en effet qu’un syndicat n’est pas recevable à demander au fond la nullité de l’ensemble du règlement intérieur ou son inopposabilité à tous les salariés de l’entreprise, du seul fait de l’absence de consultation des institutions représentatives du personnel (Cass. Soc., 21 sept. 2022, n° 21-10.718).
REFORME DU TRAVAIL: Les règles actuelles du régime de l’assurance chômage et du bonus-malus seraient prolongées.
Le 7 septembre dernier, le Conseil des ministres a adopté un projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein-emploi. Le projet de loi proroge les règles actuelles du régime d’assurance chômage jusqu’au 31 décembre 2023, alors que celles-ci devaient prendre fin en novembre 2022. Ce projet prolonge également le dispositif dit de bonus-malus jusqu’au 31 août 2024. Pour mémoire, ce dispositif, entré en vigueur le 1er septembre 2022, est prévu à l’article L. 5422-12 du Code du travail et met en place une modulation du taux de contribution à l’assurance chômage dans certains secteurs d’activité en fonction du « taux de séparation » des entreprises concernées.