NewsletterNewsletter n°175 – Juillet 2023
CLAUSE DE MOBILITE: Contrôle de l’atteinte à la vie personnelle et familiale lors de la mise en œuvre d’une clause de mobilité.
Alors qu’il avait signé une clause de mobilité, un salarié refusait sa mutation en invoquant une atteinte excessive à sa vie personnelle et familiale. De ce fait, l’employeur l’avait licencié pour cause réelle et sérieuse. Le salarié avait alors saisi la juridiction prud’homale, considérant son refus légitime. La cour d’appel de Versailles avait cependant jugé que le licenciement était justifié, la clause de mobilité ayant été mise en œuvre de manière loyale par l’employeur. Dans un arrêt du 28 juin 2023, la Cour de cassation rappelle qu’il revient au juge de vérifier « si la mise en œuvre de la clause de mobilité ne portait pas atteinte aux droits du salarié à une vie personnelle et familiale et si une telle atteinte pouvait être justifiée par la tâche à accomplir et était proportionnée au but recherché » (Cass. soc., 28 juin 2023, n°22-11.227).
ENTRETIEN PROFESSIONEL: L’entretien professionnel et l’entretien d’évaluation peuvent avoir lieu le même jour.
Là où l’entretien professionnel du salarié avec son employeur est obligatoire et consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle (C. trav., art. L. 6315-1), l’entretien d’évaluation relatif à sa performance n’est pas obligatoire, même s’il peut être imposé par une convention collective (Cass. soc., 10 nov. 2009, n° 08-42.114). Si l’entretien professionnel ne saurait porter sur les performances du salarié, et donc constituer en même temps un entretien d’évaluation, rien ne disposait que ces deux entretiens ne pouvaient se tenir à une date rapprochée. C’est d’ailleurs ce qu’a jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 5 juillet 2023 : ainsi, l’article L. 6315-1 du Code du travail « ne s’oppose pas à la tenue à la même date de l’entretien d’évaluation et de l’entretien professionnel pourvu que, lors de la tenue de ce dernier, les questions d’évaluation ne soient pas évoquées » (Cass. soc., 5 juillet 2023, n°21-24.122).
CONVENTION COLLECTIVE: Le salarié peut demander l’application de la convention collective inscrite dans son contrat de travail.
En raison de son contrat de travail à temps partiel, un salarié était soumis à une convention collective différente de celle de l’entreprise pour laquelle il travaillait. Alors que l’employeur invoquait la convention collective applicable à l’entreprise, le salarié réclamait que la convention collective mentionnée dans son contrat de travail lui soit appliquée. Dans un arrêt du 5 juillet 2023, la Cour de cassation juge, en appliquant le principe selon lequel « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits » (Cciv. art. 1103), que « si, dans les relations collectives de travail une seule convention collective est applicable, laquelle est déterminée par l’activité principale de l’entreprise, dans les relations individuelles, le salarié, à défaut de se prévaloir de cette convention, peut demander l’application de la convention collective mentionnée dans le contrat de travail » (Cass. soc., 5 juillet 2023, n° 22-10.424).
EXPERT-COMPTABLE DU CSE: L’expert-comptable du CSE ne saurait auditionner des salariés sans l’accord de l’employeur.
A l’occasion de ses consultations annuelles, un CSE souhaitait réaliser une expertise. Souhaitant réduire les coûts de celle-ci, la société avait saisi le Tribunal judiciaire. Le CSE ainsi que l’expert-comptable contestaient cette saisine en faisant valoir que le droit d’exiger de réaliser des entretiens avec les salariés découlait des articles L. 2315-82 et L. 2315-83 du Code du travail. Cependant, dans un arrêt du 28 juin 2023, la Cour de cassation juge, au visa de ces mêmes articles, que « l’expert-comptable, désigné dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, s’il considère que l’audition de certains salariés de l’entreprise est utile à l’accomplissement de sa mission, ne peut y procéder qu’à la condition d’obtenir l’accord exprès de l’employeur et des salariés concernés » (Cass. soc., 28 juin 2023, n°22-10.293).
REUNIONS DU CSE: Seul un membre du CSE peut contester la modification de l’ordre du jour effectuée en dehors des délais conventionnels et légaux.
Trois jours avant la réunion du CSE, l’un de ses membres avait demandé l’ajout à l’ordre du jour d’un vote d’une résolution sur un droit d’alerte économique. L’employeur avait refusé cet ajout, le considérant contraire aux dispositions légales (C. trav., art. L. 2315-30), et à l’accord collectif de l’entreprise qui imposait un délai de prévenance minimum de 5 jours ouvrables avant la tenue d’une réunion du CSE pour en communiquer l’ordre du jour. Le sujet ayant tout de même été abordé lors de la réunion, l’employeur avait saisi la juridiction prud’homale afin d’en obtenir la nullité. Cependant, dans un arrêt du 28 juin 2023, la Cour de cassation retient que « seuls les membres de la délégation du personnel [peuvent] se prévaloir du non-respect du délai conventionnel, de sorte que l’absence de mention à l’ordre du jour (…) du déclenchement de la procédure de droit d’alerte n’était pas un motif d’irrégularité de la délibération du comité » (Cass. Soc., 28 juin 2023, n°22-10.586).
LICENCIEMENT: L’employeur doit prouver que le licenciement d’un salarié n’est pas lié à sa demande d’élections professionnelles.
Un salarié avait été licencié peu de temps après avoir demandé l’organisation d’élections professionnelles. Contestant son licenciement, le salarié soutenait qu’il était intervenu en raison de sa demande d’organiser les élections, et qu’il ne ressortait aucune cause réelle et sérieuse de sa lettre de licenciement. Alors que les juges du fond avaient rejeté ce moyen, la Cour de cassation juge au contraire, dans arrêt du 28 juin 2023, que « le licenciement prononcé n’était pas justifié par l’existence d’une cause réelle et sérieuse, [et que] la procédure de licenciement avait été engagée [à la] date à laquelle l’employeur avait reçu sa demande d’organisation des élections des délégués du personnel, de sorte qu’il appartenait à l’employeur de démontrer l’absence de lien entre la demande du salarié d’organiser les élections professionnelles et le licenciement prononcé » (Cass. soc., 28 juin 2023, n°22-11.699).
ALERTES PROFESSIONNELLES: Nouveau référentiel de la CNIL sur le traitement des données personnelles dans le cadre des dispositifs d’alerte professionnelle.
Le 6 juillet 2023, la CNIL a mis en place un nouveau référentiel relatif au traitement de données effectué dans le cadre des dispositifs d’alertes professionnelles. Il est destiné à tout organisme qui met en place un dispositif de recueil et de gestion interne des alertes professionnelles impliquant un traitement des données personnelles, ainsi qu’à toute entité tierce qui propose un service de réception, de traitement et de conservation des alertes. Le référentiel permet d’encadrer ces entités et d’assurer la conformité de leurs pratiques avec le RGPD et les dispositions légales. Sont concernés les dispositifs d’alerte en cas de corruption ou de trafic d’influence et tout autre dispositif d’alerte interne mis en place sans contrainte réglementaire ou pour se conformer à une obligation résultant du droit étranger. Le référentiel n’est pas contraignant, mais les entités qui s’en écarteraient devraient justifier et documenter ce choix et les mesures prises en conséquence (Délibération Cnil n°2023-064, 6 juillet 2023, JO 21 juillet).