NewsletterNewsletter n°176 – Août 2023
CONGES PAYES: Un arrêt de travail pour maladie d’origine non professionnelle n’empêche pas l’acquisition de congés payés.
L’article 7 § 1 de la directive européenne n° 2003/88/CE garantit à tout salarié un minimum de 4 semaines de congés payés annuels. Alors que cette directive devrait être transcrite en droit interne, un salarié français ne bénéficie pas, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, de congés payés pendant une période d’arrêt de travail pour maladie d’origine non professionnelle (C. trav., art. L.3141-5). Dans un arrêt du 17 juillet 2023, la cour administrative d’appel de Versailles rappelle que « s’agissant de travailleurs en congé de maladie dûment prescrit, le droit au congé annuel payé conféré par cette directive à tous les travailleurs ne peut pas être subordonné par un État membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit État » (CAA Versailles, 17 juillet 2023, n°22VE00442).
REFORME DES RETRAITES: Précisions relatives à la retraite progressive, à la pension issue du cumul emploi-retraite intégral et au régime social de la rupture conventionnelle individuelle.
Les décrets n° 2023-751 et n° 2023-753 du 10 août 2023 facilitent l’accès à la retraite progressive, qui permet à un salarié de liquider une partie de sa retraite avant l’âge légal de départ et passer à un temps partiel. Afin de faciliter son recours, ces décrets ont précisé les modalités d’exécution de l’article 26 de la LFRSS n° 2023-760 du 14 avril 2023, qui a étendu le champ de ses bénéficiaires, limité les possibilités de l’employeur de la refuser et permis au salarié de demander une dérogation à la durée minimale du temps partiel. Le premier décret rappelle que le salarié devra avoir validé au moins 150 trimestres pour y accéder. Le second précise que la retraite progressive ne peut être mise en place que deux ans avant l’âge légal de départ à la retraite du salarié, âge qui sera prolongé suivant le report progressif de l’âge légal de départ à la retraite. Par ailleurs, ces deux décrets rendent les revenus issus du cumul emploi-retraite créateur de droits à retraite. Ces revenus étant soumis à cotisations, le salarié pourra, à l’issue de la période de cumul emploi-retraite, obtenir une pension supplémentaire, qui sera calculée et liquidée dans les conditions applicables à la pension de vieillesse du régime dont relève le salarié, comme en dispose le décret n°2023-751. De même, selon le décret n°2023-753, cette pension bénéficiera du taux plein, et aucun supplément, majoration ou accessoire ne pourra lui être attaché. Cette pension sera soumise à un plafond annuel équivalent à 5% du PASS. Enfin, le décret n° 2023-760 du 10 août 2023 mettant en l’article 4 de la LFRSS n° 2023-270 du 14 avril 2023 vise à limiter les ruptures conventionnelles individuelles de salariés en fin de carrière. Est donc supprimé le régime qui rendait fiscalement attractive la rupture conventionnelle d’un salarié éligible à liquider sa retraite à taux plein. Le décret met en place un régime unifié pour toutes les ruptures conventionnelles individuelles et les mises à la retraite, en créant une unique contribution patronale de 30% sur la fraction de l’indemnité versée au salarié qui est exonérée de cotisations, tant qu’elle ne dépasse pas dix PASS (décret n°2023-751, décret n° 2023-753 et décret n° 2023-760 du 10 août 2023 JO du 11 août, LFRSS n° 2023-270 du 14 avril 2023, JO du 14 avril).
PORTAGE SALARIAL: Un contrat de portage salarial peut être requalifié en CDI dans un délai de 5 ans suivant son terme, même si le salarié ne pourvoyait pas un emploi permanent.
Un salarié avait été embauché par une société dans le cadre d’un contrat de portage. Au terme de ce contrat, le salarié demande sa requalification en CDI. Dans un arrêt du 7 avril 2023, la cour d’appel de Grenoble fait droit à sa demande: « si un contrat de portage salarial ne peut être requalifié en contrat à durée indéterminée en l’absence de disposition spécifique le prévoyant au motif que le salarié porté pourvoirait un emploi permanent au sein de l’entreprise cliente (…), le salarié porté dispose pour autant d’une action visant à voir reconnaître que sous couvert d’une prestation pour une entreprise cliente dans le cadre d’un portage salarial, les conditions de l’existence d’un contrat de travail étaient en réalité réunies eu égard à l’existence vis-à-vis de cette entreprise d’un lien de subordination (…), une telle action étant soumise au délai de prescription de droit commun de cinq ans, dont le point de départ se situe à la date de la fin de la prestation » (CA Grenoble, 7 avril 2023, n°20/03485).
DELEGATION DE POUVOIRS: La nouvelle CCN de la métallurgie impose une « réflexion préalable » avant la mise en œuvre d’une délégation de pouvoirs.
Entrant en vigueur le 1er janvier 2024, l’article 167.1 de la nouvelle CCN de la métallurgie prévoit que toute délégation de pouvoirs devra être précédée d’ « une réflexion préalable au sein de l’entreprise sur la nature et l’étendue des pouvoirs et responsabilités pouvant en faire l’objet, ainsi que sur le niveau hiérarchique adapté de délégation ». L’entreprise devra surtout veiller « à ce que la délégation de pouvoirs coïncide avec la réalité des fonctions et des pouvoirs dans l’entreprise au moment de l’établissement de la délégation, et dans la durée ». La CCN précise que la délégation doit être continue, et qu’un écrit doit en faire état. Cependant, elle ne précise ni les modalités de la mise œuvre de la réflexion préalable, ni son formalisme, ce qui conduit à des questionnements sur ses moyens de contrôle (article 167.1 de la CCN de la métallurgie du 7 février 2022).
USURE PROFESSIONNELLE: Précisions sur l’application de l’article 17 de la LFRSS du 14 avril 2023 sur la prévention de l’usure professionnelle.
Les décrets n° 2023-759 et n° 2023-760 du 10 août 2023 mettent en œuvre l’article 17 de la LFRSS n° 2023-270 du 14 avril 2023, en créant le fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle. Celui-ci a pour objet d’améliorer la prévention des expositions aux facteurs de risques professionnels ergonomiques, c’est-à-dire les postures pénibles, les vibrations mécaniques et le port de charges lourdes. Cette prévention se fera tant au niveau des entreprises que des branches. Par ailleurs, les décrets renforcent le compte professionnel de prévention (C2P), en facilitant son recours, en améliorant les droits existants, et en créant un droit à la reconversion professionnelle sans perte de rémunération (décret n° 2023-759 et décret n° 2023-760 du 10 août 2023, JO du 14 avril).
ELECTIONS PROFESSIONNELLES: Dans les entreprises de 11 à 20 salariés, l’employeur doit organiser les élections professionnelles, même en l’absence de candidat.
L’alinéa 5 de l’article L.2314-5 du Code du travail dispose que, dans les entreprises de 11 à 20 salariés, « l’employeur invite les organisations syndicales (…) à la négociation du protocole préélectoral à la condition qu’au moins un salarié se soit porté candidat aux élections ». Si cet alinéa a prêté à controverse, il convient d’attirer l’attention des employeurs sur le Cerfa n°15248*05 vérifié le 8 août 2023 par la direction de l’information légale et administrative, qui présente un encadré dans lequel il faut désormais préciser la date des deux tours, auxquelles aucun candidat ne s’est présenté, en vue de constater la carence (Cerfa n°15248*05 « procès-verbal de carence pour tous les collèges du CSE »).