NewsletterNewsletter n°184 – Avril 2024
CONGES PAYES ET ARRETS MALADIE: Les nouvelles dispositions légales concernant l’acquisition de congés payés pendant un arrêt maladie sont entrées en application le 24 avril 2024.
L’article 37 de la loi n°2024-364 du 22 avril 2024 modifie le Code du travail, afin de se conformer au droit de l’Union européenne. Le nouveau texte prévoit que les salariés en arrêt de travail pour maladie ou accident d’origine non-professionnelle cumuleront 2 jours de congés payés par mois dans la limite de 24 jours ouvrables par an. Quant aux salariés absents pour maladie ou accident d’origine professionnelle, ils continuent d’acquérir 2,5 jours ouvrables de congés payés par mois (soit 30 jours ouvrables par an). Une nouvelle obligation est mise à la charge de l’employeur : à l’issue d’une période d’arrêt de travail, ce dernier doit informer le salarié du nombre de congés payés dont il dispose, ainsi que de la date jusqu’à laquelle ces jours peuvent être pris. En effet, la loi ajoute que, si un salarié est dans l’impossibilité, pour cause de maladie ou d’accident, de prendre au cours de la période de prise de congés tout ou partie des congés qu’il a acquis, il a la possibilité d’en obtenir le report dans un délai maximum de 15 mois. Enfin, le texte précise qu’un délai de forclusion de 2 ans s’applique à compter de sa publication aux salariés en poste qui souhaiteraient solliciter le bénéfice de jours de congés pour la période antérieure.
LICENCIEMENT D’UN SALARIE PROTEGE: La demande d’autorisation de licenciement d’un salarié protégé, déposée par une personne non habilitée à agir au nom de l’employeur, peut être corrigée avant que l’inspection du travail ne se prononce.
Le Conseil d’Etat affirme, pour la première fois, qu’il est possible de procéder à la régularisation ultérieure d’une demande d’autorisation de licenciement, si celle-ci n’a pas été introduite par une personne habilitée. Toutefois, il est précisé qu’afin d’être valable, cette régularisation doit être réalisée pendant l’instruction, en fournissant un document prouvant que le signataire initial avait le pouvoir de licencier. Aussi, la Haute juridiction administrative rappelle sa jurisprudence (notamment CE 9 avril 2004, n°233630) selon laquelle l’inspection du travail saisie d’une demande d’autorisation de licenciement d’un représentant du personnel doit vérifier la qualité de l’auteur de la demande (CE 12 avril 2024, n°459650).
LICENCIEMENT ECONOMIQUE: Les éléments d’appréciation des critères d’ordre de licenciement peuvent varier selon les catégories professionnelles.
En l’espèce, un PSE unilatéral avait notamment fixé comme critère d’appréciation les évaluations professionnelles pour la catégorie professionnelle composée uniquement des cadres, le critère de mobilité géographie et/ou fonctionnelle des salariés ayant été retenu pour les autres catégories. Le CSE de l’entreprise a agi en justice, arguant que cette différenciation dans la fixation des critères instaurait une discrimination et que le critère de la mobilité géographique n’était pas pertinent. Le Conseil d’État rejette ces arguments, considérant que les éléments d’appréciation des critères d’ordre peuvent être différents selon les catégories professionnelles. La Haute juridiction administrative précise également qu’il « ne résulte d’aucune règle ni d’aucun principe que le critère d’ordre relatif aux qualités professionnelles doit être apprécié en prenant en compte au moins deux indicateurs distincts » (CE 12 avril, n°459650).
CSE ET ACTIVITES SOCIALES ET CULTURELLES: Un critère d’ancienneté dans l’attribution des ASC du CSE est illégal.
En l’espèce, un comité social et économique avait, dans le cadre de son règlement intérieur, conditionné l’accès aux activités sociales et culturelles (ASC) à une ancienneté minimale de six mois. Considérant que cela revenait à exclure certains salariés du bénéfice des ASC, une organisation syndicale a sollicité l’annulation de ladite clause. La Cour de cassation fait droit à cette demande en déclarant, pour la première fois, que s’il appartient au CSE « de définir ses actions en matière d’activités sociales et culturelles, l’ouverture du droit de l’ensemble des salariés et des stagiaires au sein de l’entreprise à bénéficier des activités sociales et culturelles ne saurait être subordonnée à une condition d’ancienneté » (Cass. Soc., 3 avril 2024, n°22-16.812).
LICENCIEMENT VERBAL: Le licenciement annoncé verbalement au salarié avant l’envoi de la notification est privé de cause réelle et sérieuse.
Dans cette affaire, un salarié avait été licencié pour faute grave. L’annonce de la mesure avait été réalisée par téléphone, avant que la notification soit envoyée, le jour même. Le salarié saisit la juridiction prud’homale, afin de contester son licenciement. A juste titre, selon la Cour de cassation, qui rappelle sa jurisprudence constante, selon laquelle le licenciement annoncé verbalement avant l’envoi de la lettre est nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc., 3 avril 2024, n°23-10.931).
TRAVAIL DOMINICAL ET JEUX OLYMPIQUES: La dérogation au repos dominical est soumise au volontariat du salarié, sous peine d’infraction contraventionnelle.
Pour mémoire, l’article 25 de la loi n°2023-380 du 19 mai 2023 autorise, sous réserve d’autorisation préfectorale, les commerces de détail proches des sites olympiques à déroger à l’obligation de fermeture dominicale, avec l’accord des salariés concernés. A cet égard, le salarié peut révoquer sa décision de travailler le dimanche en informant par écrit son employeur avec un préavis de dix jours francs. Le décret n°2024-338 du 12 avril 2024 ajoute que l’inobservation par l’employeur de la condition de volontariat du salarié, constitue une infraction contraventionnelle de 5ème classe.
ENGAGEMENT UNILATERAL: Contrairement à un usage d’entreprise, l’engagement unilatéral qui a été reconduit ne nécessite ni dénonciation ni préavis.
Les engagements unilatéraux sont créés par la seule volonté de l’employeur. Ils se distinguent des usages d’entreprise, qui sont issus de pratiques générales, fixes et constantes, sans durée déterminée. Afin de ne plus appliquer un usage, il est nécessaire de procéder à une dénonciation et de respecter un préavis. Cette obligation découle du caractère indéterminé de sa durée et de son exécution successive. En l’espèce, l’engagement unilatéral de l’employeur avait un terme expressément déterminé, faisant obstacle à la qualification d’usage, même en présence d’une ou plusieurs reconductions. Ainsi, une fois arrivé à son terme, l’engagement cesse de s’appliquer, sans que l’employeur ait à procéder à une dénonciation respectant un préavis raisonnable (Cass. Soc., 3 avril 2024, n° 22-16.937).
BULLETINS DE PAIE ET VIE PRIVEE: Publier le bulletin de paie d’un délégué syndical dans un tract syndical porte atteinte à sa vie privée.
En l’espèce, deux syndicats accusaient un salarié représentant un autre syndicat de cumul de mandats et de corruption, et avaient diffusé, parmi les salariés, des tracts reproduisant partiellement ses bulletins de salaire. Ce dernier a donc saisi le juge judiciaire pour atteinte à la vie privée. Conformément à sa jurisprudence, la Haute juridiction considère que la diffusion du bulletin de salaire d’un délégué syndical dans un tract émanant d’un autre syndicat constitue une atteinte à sa vie privée dont le seul constat ouvre droit à réparation (Cass. Soc., 20 mars 2024, n° 22-19.153).